Ladislas Starewitch à Fontenay-sous-Bois – un bel article dans « Le Petit Rigollot » !

 

   Une bonne surprise au printemps 2025 !

   À l’été 2020 j’avais rencontré Arnaud Garrigues, journaliste, qui cherchait des informations sur la présence de Ladislas Starewitch à Fontenay-sous-Bois. Le Petit Rigollot, revue publiée par la mairie de la commune (« Production locale et artisanale à base de jus de crâne et d’huile de coude »), préparait un numéro spécial sur toutes les personnes qui sur ce territoire avaient participé ou participaient encore à des activités liées au cinéma. L. Starewitch en faisait évidement partie.


   Et en ce printemps 2025 Françoise Navailh me montre ce numéro, trouvé dans une boite à livre… Le sommaire est copieux pour une publication de 62 pages pleines d’informations et d’humour -  gratuite qui plus est - parue à l’automne 2021 !


    L'article illustré d’A. Garrigues : Starewitch, l’homme animé par le cinéma, p. 20-21, respire la même veine que le journal. En évoquant l’arrivée (en 1924) de L. Starewitch et de sa famille et leur séjour dans la commune, il ajoute et complète le texte dans lequel je retraçais les débuts du cinéaste dans la ville de sa jeunesse à Kovno (aujourd’hui Kaunas en Lituanie).

 

Arnaud Garrigues : Starewitch, l’homme animé par le cinéma, Le Petit Rigollot, Fontenay-sous-Bois, 2021, p. 20-21.
Le Petit Rigollot – production locale et artisanale à base de jus de crâne et d’huile de coude.

Allez au 34 de l’avenue Foch à Fontenay-sous-Bois, et observez cette maison à façade blanche. Quasi symétrique. Avec une petite excroissance sur la droite. « C’est Starewitch qui l’a fait réaliser », nous explique François Martin, qui avec sa femme, Léona Béatrice (petite fille de Starewitch) œuvrent à faire connaitre le travail de ‘ancien maître de ces lieux, et qui a marqué l’histoire du cinéma. « Maintenant, décalez-vous sur le côté, et vous commencerez à voir les contours d’une pièce, au premier étage, qui ne devait pas faire plus de 60 mètres carrés, et qui était baignée par la lumière d’une verrière », poursuit-il. C’est là que le génial Starewitch, entouré de ses dizaines de petits personnages a créé une grande partie de son œuvre.

Peut-être ne le connaissez-vous pas. Apprenez alors que son œuvre est citée en référence par quelques-uns des plus grands réalisateurs d’aujourd’hui, de Wes Anderson à Terry Gilliam ou aux frères Cohen. Tous sont fascinés par sa capacité à créer de la vie à partir de personnages et objets inanimés.  D’une manière fine et si reconnaissable, en construisant des scénettes souvent très riches et chargées de détails « trop diront certains », en inventant des solutions pour donner encore plus cette sensation de vie à des corps inanimés. C’est sans doute lui le grand pionnier de l’animation, et qui a réussi à comprendre comment donner l’illusion du mouvement. Passionné d’entomologie, c’est avec des insectes qu’il commence à travailler, notamment de véritables hannetons qui se retrouvent figés par les lumières ardentes des projecteurs lorsqu’il essaye de les filmer. D’où l’idée de les utiliser morts, en articulant leurs membres, et en enchaînant les photographies qui, mises en mouvement, produisent l’illusion de la vie. Il créera ensuite des personnages animaliers qu’il mettra en scène par exemple dans ce qui est son chef d’œuvre, Le roman de renard, 1941.

L’homme est un autodidacte, un génial « touche à tout ». Il était issu d’une famille éduquée et il pouvait faire ce qu’il voulait. C’était l’école buissonnière dans tout ce qu’elle a de mieux », explique François Martin. Il fait du théâtre, réalise des affiches, peint. Il est embauché au cadastre, et se balade beaucoup, fait des photos et commence à réaliser de petits films qu’il propose au musée d’ethnographie de Kovno (Lituanie). Il va déjà sur ses 27 ans. Une vie oisive. Il se lance dans ses premiers films d’animation. « À l’époque, il pense être le seul à le faire », explique François Martin. Ce qui n’est peut-être pas le cas, d’autres pionniers comme Émile Cohl agissant ici o là, « mais il est le premier à faire de tels films en racontant des histoires », souligne son ardent défenseur. Après ces premières réalisations, il rencontre rapidement le succès. Il part à Moscou en 1912 et commence à faire des films, cette fois avec de vrais acteurs, en y greffant tout de même des trucages, mais pas à la manière d’un Méliès, « qui fait des trucages pour les trucages. Les siens servent l’histoire », ajoute François Martin. Beaucoup de réalisateurs se réfèrent aujourd’hui à ce savant le mélange de trucages et du réel », ajoute-t-il, citant un de ces premiers films où l’un des personnages – qui n’est autre que le Diable – est rapetissé et se glisse dans la poche du veston d’un autre personnage pour pouvoir rentrer discrètement dans un lieu.

   Ce qui est fascinant chez Starewitch, c’est qu’i maîtrise ma totalité de la chaîne cinématographique : scénario, fabrication des personnages et des décors, cadrage, mise en scène et parfois même la production). Il va vite s’affranchir de toute l’intendance du cinéma et fera tout lui-même. Ou plus exactement en famille, avec sa femme Anna, qui créera par exemple des costumes, et de ses deux filles Irène et Nina, la première participant à l’écriture et la réalisation, la deuxième jouant dans ses films. Réaliser un film comme Le roman de renard, qui dure 65 minutes, ne leur prendra que 18 mois ! Après avoir obtenu un prix aux Etats-Unis pour son film La voix du rossignol en 1925, il refusera même de partir à Hollywood qui voulait s’attacher ses services. Mais comment cet homme de cinéma s’est-il retrouvé à Fontenay-sous-bois ?

Il a quitté Moscou après la révolution d’octobre 1917. Âgé de 36 ans, il entame alors un périple dans différentes villes, fuyant l’avancée du front russe, d’Odessa à Yalta. Puis ce sera Constantinople, Milan… avant de rejoindre la France en 1920. « Ill est allé là où il pouvait faire de cinéma », explique François Martin. Il choisira alors d’aller à Paris où il restera quelques mois, puis à Joinville-le-Pont pendant trois ans, où il sera à proximité des studios de cinéma situés en bord de Marne. Enfin il viendra s’installer à Fontenay-sous-bois en 1924, dans cette maison blanche qu’il ne quittera plus jusqu’à sa mort en 1965. François et Léona Béatrice Martin perpétuent donc l’œuvre de Starewitch, financent la restauration de dizaines de films et sont actuellement en train de travailler sur ceux réalisés entre 1920 et 1950.nILs vont jusqu’à faire composer des œuvres musicales originales pour accompagner ces films, certains étant muets, d’autres disposant de voix off. Mais comme le souligne François Martin, « dans ces films, ce sont les images qui parlent ». Et sa science de l’animation.

Un hommage lui a été rendu en 2014 par un travail conjoint entre la Ville de Fontenay-sous-bois et la cinémathèque de Bourgogne. Des projections et des journées d’échange ont été organisées au Kosmos, avec la venue de celui qui est sans doute l’un des plus grands historiens du cinéma, Jean Douchet ; deux autres journées se sont tenues un an plus tard en Bourgogne. Et plus récemment, lors des dernières journées du patrimoine, les 19 et 20 septembre 2020, deux films de Starewitch – La voix du rossignol et Le Lion et le Moucheron – ont été projetés au pavillon Baltard, à, Nogent-sur-Marne, accompagnés par une musique jouée sur l'orgue mythique du Gaumont-Palace qui trône dans ce bâtiment. L’occasion pour ceux qui ont pu y participer de se replonger dans l’ambiance d’une séance de cinéma muet… »

 

www.starewitch.fr   Ce site créé par Léona Béatrice et François Martin, est une line. Foncez !

C’est sans doute lui le grand pionnier de l’animation.

Le Petit Rigollot aime Fétiche.

 

PS : "Les Rigollots" est le nom d'un quartier de Fontenay-sous-Bois.